Mens sana in corpore…
En 1928 la direction du Marie-José est assumée par Renée Racine, originaire de Genève où elle était cadre de l’Armée du Salut. Elle a ouvert l’école au monde de la culture, adopté le programme français, tout en maintenant les traditions hygiénistes héritées de Mlle Servet : la journée débutait par la gymnastique, torse nu devant les fenêtres ouvertes, même en hiver. Seules les Grandes avaient la permission de garder leur chemisette… L’après-midi : sieste obligatoire sur la terrasse, une demi-heure sur le dos, une demi-heure sur le ventre. Après la sieste, jeux ou activités sportives.
La discipline était rigoureuse, les punitions sévères. L’énurésie était stigmatisée (il n’y avait à la lingerie qu’une seule machine à laver, or la maisonnée comptait soixante personnes)… Ceux qui avaient mouillé leur lit devaient se rendre à table le soir en tablier, vêtus d’un sarrau de travail alors que les filles portaient leur jolie robe du soir et les garçons chemise blanche et cravate. Les indisciplines graves, toute violence physique ou verbale, pouvaient être sanctionnées par la fessée, appliquée par l’infirmière, jamais à main nue (Renée avait lu Rousseau) mais au ceinturon de l’armée suisse.
Les commodités étaient spartiates : deux WC à l’étage des garçons, deux à l’étage des filles, réservés aux Grands. C’est dire que les Petits étaient astreints à la séance matinale collective des pots de chambre alignés dans la salle de bain. Ils partageaient à plusieurs la même baignoire car l’unique chaudière ne permettait pas les excès.
Une quarantaine de pensionnaires étaient répartis en quatre classes. L’école était de haut niveau, les fautes d’orthographe mal tolérées, les leçons de calcul mental acrobatiques, les poèmes devaient être récités sans faute et avec le ton. Les élèves allophones avaient le droit de parler anglais jusqu’à Noël, ce délai de trois mois écoulé seul le français était toléré. A la fin de l’année tout le monde parlait français sans accent.
L’austérité scolaire était compensée par les activités sportives et des fêtes rituelles : Saint Nicolas arrivait en traineau accompagné de Pierre le Noir, porteur de verges mais aussi de sacs remplis de friandises. A Noël les chants, le sapin et une pièce de théâtre. En juillet, la fête de fin d’année et ses quatre pièces de théâtre – Petits, Moyens, pièce en anglais, pièce des Grands : Molière, Sophocle, Tagore, Goldoni, même Athalie de Racine.
En hiver, le jeudi et le dimanche étaient réservés aux activités sportives : ski, patinage et hockey. La cloche sonnait à dix heures moins le quart. Ruée vers les étages, WC, retour au vestiaire… A dix heures tapantes toute la maisonnée était prête au départ, skis sur les épaules, vingt bonnes minutes de marche pour se rendre au pied des téléskis. Deux descentes, trois pour les avancés, et retour en montant les échelles de Jacob.
En été : tennis et randonnée, pour les Grands une virée sur le glacier du Wildhorn, un peu de varappe à la Videmanette. Un groupe est resté célèbre pour avoir rallié Sion à pied, en partant du Chalet, par le col du Sanetch : une journée entière de marche.